Ligne claire, ligne sombre & autres aventures

lundi 26 novembre 2018

Philippe de Broca : l'autre hommage à Hergé

C'est entendu pour tout le monde : "L'Homme de Rio", de Philippe de Broca, avec Jean-Paul Belmondo, est la meilleure "adaptation" de Tintin au cinéma. Rien ne manque : un avion jaune, des statuettes au fond de la jungle, des crocodiles qui menacent le héros pendu à un arbre, un numéro d'équilibriste sur une corniche...



Dans "Moulinsart/Hollywwod", l'excellent documentaire que Benoît Peeters a consacré aux relations entre Tintin et le cinéma, Philippe de Broca révèle que Spielberg lui a avoué un jour dans une lettre avoir vu neuf fois "L'Homme de Rio" (lequel a beaucoup inspiré "Les Aventuriers de l'arche perdue"). Broca confesse aussi : "Je suis un fanatique d'Hergé. Je connaissais tout par coeur."

Il est d'ailleurs un autre de ses films qui fait un clin d'oeil discret aux aventures de Tintin (1). Il s'agit du délicieux "Diable par la queue", tourné à l'été 68 au château de Fléchères, dans l'Ain. Ah, la jupe courte et les pieds nus de Marthe Keller ! Ah, la mélancolique Clotilde Joano ! Ah, la musique de Georges Delerue ! (Et un Jean-Pierre Marielle impeccable, comme d'habitude).

Bref, à la fin du film, Yves Montand veut indiquer un terrain d'atterrissage à ses complices venus le récupérer en avion, lui et les billets de banque d'un casse réalisé peu avant. Pour cela, il utilise des lanternes disposées en triangle dans un champ.

Exactement comme Tintin dans "L'ile noire".



L'attente :




Le bruit de l'avion :




L'arrivée de l'avion :



La course finale :




(Pour voir la scène en entier, regarder ici à partir de 1h22''.)

Outre la succession fidèle des séquences, ce qui les rapproche, c'est la lumière crépusculaire, ces bleu-nuit dans lesquels Hergé excellait. Ce crépuscule bleuté fait tout le charme esthétique de ces deux scènes.

Dans les deux cas, l'opération des "méchants" échoue.

Outre ce magnifique clin d'oeil hergéen, "Le Diable par la queue" a aussi quelque chose des "Bijoux de la Castafiore". C'est un "film de château". Tout ou presque se déroule dans le château et ses jardins, comme pour les "Bijoux" et Moulinsart. Il y est aussi question d'un vol (bijoux d'un côté, billets de banque de l'autre). Et le piano est omniprésent dans les deux histoires.

Il est en revanche une immense différence entre les deux oeuvres. "Le Diable par la queue" est tout en sensualité, avec un trio de femmes irrésistibles, espiègles, sexys. On ne peut en dire autant de Bianca et Irma...

(1) Il n'est pas recensé dans le très complet "Tintin, Hergé et le cinéma", de Philippe Lombard (Democratic Books, 2011), qui consacre un chapitre à Philippe de Broca.




Hergé et Swarte au pays des étoiles

C'est un petit objet qui, à vrai dire, vaut plus par son aspect extérieur que par son contenu. "Hergé au pays des étoiles" est un album-pirate de petit format (15 x 23 cm), avec un beau dos toilé rouge et une couverture pelliculée. La fabrication extérieure est extrêmement soignée.


4ème plat

Le dessin de couverture est emprunté à Joost Swarte et à son histoire "Les aventures d'Hergé il y a 50 ans", parue dans le 30 x 40 de Futuropolis. Il s'agit de la dernière case de cette histoire, légèrement recadrée. Les "pirates" ont ajouté des étoiles hergéennes autour du visage, pour coller au titre et au sujet. La maquette reprend celle des albums de Tintin d'avant-guerre, sur fond crème.

Quant au contenu, il est plus artisanal : photographies d'Hergé et cases de Tintin illustrant une analyse astrologique du dessinateur (Neptune ascendant Cancer et autres fariboles...). Elles sont empruntées à "Tintin et moi", de Numa Sadoul et au livre-cassette "Hergé" de Benoît Peeters, soit des études assez anciennes. Si l'on ajoute que l'histoire de Swarte a été publiée en 1980, on peut sans doute dater cet album-pirate de 1981.

D'autant que son ou ses auteurs semblent liés au magazine belge branché "Soldes-Fins de Série", qui paraissait à cette époque (une des couvertures était signée Ever Meulen). Il y est fait référence au début et à la fin de l'ouvrage.

On ne voit pas souvent passer ce petit livre en vente sur le net. Le tirage a dû être extrêmement réduit. Une vraie curiosité.